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Revue N°93 – année 2025

            La biographie occupe une place importante dans la production éditoriale française et la revue que nous vous proposons cet automne en constitue le parfait exemple. Il n’en a pourtant pas toujours été ainsi en Histoire. Longtemps méprisée par les historiens qui y voyaient un genre mineur, réservé aux amateurs, aux vulgarisateurs, elle offrait trop souvent aux lecteurs l’étude du parcours d’une femme ou d’un homme en dehors de toute contextualisation, dans une visée plus ou moins hagiographique[1]. L’Histoire locale et régionale n’échappa pas à la règle et, pour ne prendre que la bibliographie des guerres de Vendée, nombre d’ouvrages ont présenté tel ou tel des chefs vendéens comme des héros à la destinée sinon mystique, en tout cas fantasmée.

Depuis, la biographie est revenue en grâce auprès des scientifiques. Elle entend associer le sujet qu’elle décrit et analyse à son milieu, à une population dans son ensemble, dans une perspective de microhistoire chère à l’Italien Carlo Guinzburg. Les auteurs des articles de cette revue, sans avoir l’ambition des grands biographes universitaires, n’en ont pas moins voulu présenter des personnages aux destinées singulières, de la guerre civile espagnole aux dernières années de l’Ancien Régime et de la Révolution en passant par les campagnes napoléoniennes et la Restauration.

          No pasaran, un Bressuirais dans la guerre civile espagnole.    En 1936, lorsque la guerre civile enflamma l’Espagne voisine, les républicains, menacés par les nationalistes de Francisco Franco, reçurent le soutien de milliers d’hommes et de femmes venant du monde entier qui formèrent les « Brigades internationales ». Originaire de Bressuire, le jeune homme suivi par Loïc Baufreton, Guy Lecointre, fut l’un d’eux. L’auteur retrace son itinéraire de jeune fils de la bourgeoisie qui rompt avec son milieu pour traverser les Pyrénées et s’engager dans un combat sans espoir où il trouva une mort anonyme, en Aragon, loin des siens.

            Pierre François Deschamps, parcours d’un colonel bressuirais. C’est un autre enfant de la bourgeoisie bressuiraise que Jacques Ethioux présente. Fils du premier maire élu de Bressuire, Pierre François Deschamps s’engage dans la garde nationale de sa ville en 1789 puis va mener une carrière militaire au long cours pendant la Révolution et l’Empire, foulant tous les champs de batailles de l’Europe en guerre, passant de simple grenadier à colonel. Plusieurs fois blessé, il revient s’établir à Bressuire à la fin de l’Empire pour s’y marier, tardivement, et fonder une famille.

           Un prêtre « paisible » dans la tourmente. Pascal Hérault s’est intéressé à une autre fils de la bourgeoisie, François Turpault que rien ne prédestinait aux dangers qu’il a affrontés dans sa vie d’ecclésiastique. Simple chapelain puis principal de collège à Sanzay et enfin prêtre à Voultegon, il refuse de prêter le serment à la Constitution civile du clergé en 1791 et devient réfractaire. Bientôt pourchassé par les révolutionnaires, il se cache dans le Bocage. Son refus du Concordat en 1801 l’oblige à continuer son sacerdoce dans la clandestinité avant de réapparaître au grand jour à Brétignolles quelques mois avant son décès en 1816.

            François Berthelot, un médecin des Lumières. Médecin des Lumières, fils de bourgeois, François Berthelot est surtout connu pour sa Topographie de la ville et subdélégation de Bressuire, rédigée en 1786. Michel Chatry nous décrit un étudiant formé à la célèbre faculté de médecine de Montpellier, un homme de son temps dont les centres d’intérêt sont multiples : la médecine bien sûr, mais aussi l’agronomie, l’étude du climat, des paysages… avant de s’engager dans la vie publique de sa ville au début de la Révolution.

[1] Robert J. Knecht, « La biographie et l’historien », in Cahiers de l’Association internationale des études françaises, 2000, n°52, p. 169-181.