Le ministre du commerce par une circulaire du 5 juillet 1834, apprenait aux préfets que la « loterie d’Etat » cesserait d’exister à la fin de 1835 et les engageait à provoquer la fondation de Caisses d’ Epargne dans les chefs-lieux de département et d’arrondissement : il était recommandé de diriger vers ces établissements « les sommes que l’imprévoyance consacrait au jeu ». Entre temps, Benjamin Delessert avait déposé une proposition de loi tendant à organiser définitivement les Caisses d’ Epargne. Elle fut votée en 1835.
C’est à la suite de la circulaire du 5 juillet 1834 dont il vient d’être parlé que le conseil municipal de Bressuire fut invité à délibérer sur cette question. Le sujet fut abordé pour la première fois le 4 janvier 1835, mais on dut y revenir pour quelques modifications de rédaction le 22 mars. L’assemblée était composée de MM Leclerc maire, Bonsergent adjoint, Delafargue, Petit, Bernard, Bernier, Cottenceau Paul, Cottenceau Armand, Barbaud aîné, Ducrocq, Bienvenu et Suire. Elle arrêta la délibération suivante : « Il sera établi à Bressuire, sous l’autorisation du gouvernement, une Caisse d’ Epargne et de Prévoyance pour la Ville et l’arrondissement de Bressuire ».
« …La Caisse sera administrée gratuitement par un conseil composé du maire de Bressuire et de 15 directeurs dont les fonctions dureront trois ans et qui seront renouvelés par tiers chaque année. Les directeurs sortants seront indiqués par le sort et seront choisis : 3 parmi le conseil municipal, et 12 parmi les personnes les plus recommandables de la ville et particulièrement parmi les souscripteurs. Le maire préside le conseil des directeurs toutes les fois qu’il assiste aux séances et il peut se faire représenter par un adjoint. » Les statuts de la Caisse ayant été approuvés par ordonnance royale du 3 septembre 1835, le conseil municipal se réunit le 9 novembre pour procéder au choix des 15 directeurs. Parmi ceux-ci on relève les noms de Barrion (ex-notaire), Barbaud jeune, Aubin,Pihoué, Baudry (libraire).
Le conseil des directeurs se réunit à son tour le 30 novembre 1835 sous la présidence de M Delafargue, adjoint, remplissant par intérim les fonctions de maire. La seconde séance fut tenue le 28 janvier 1836. On avançait qu’à petits pas depuis la première délibération et il faudra attendre la date du 2 octobre 1836 pour parvenir aux premiers versements. C’est qu’il faut bien comprendre qu’à cette époque Bressuire n’était pas encore relevée de ses ruines, la ville comptait environ 2 000 habitants et cette faible population vivait encore dans une inquiétude continuelle.
En 1861, les conseils municipaux de Thouars et de Châtillon-sur-Sèvre (Mauléon) demandaient à la Caisse d’ Epargne de Bressuire de bien vouloir ouvrir des succursales dans ces deux villes. Le 12 novembre 1911, la succursale des Aubiers fut ouverte ; ce fut la première succursale, le projet de celle de Châtillon ayant été ajourné. La Caisse d’ Epargne de Thouars, elle, avait été créée dès 1867. La seconde succursale fut celle de Cerizay, ouverte le 5 avril 1920.
En votant le statut de la Caisse d ’Epargne, le conseil municipal lui offrait de la loger à la mairie qui depuis 1820 environ occupait et occupe encore l’emplacement de l’ancien établissement des Cordeliers. Elle profita de cette gratuité jusqu’en 1882.
Dans son rapport en 1881, le caissier rappelait qu’on avait fait placer un poêle dans le vestibule servant de salle d’attente, mais que l’installation n’offrait pas le confort auquel les déposants avaient droit. Aussitôt, on nomma une commission qui acheta un immeuble, rue des hospices (où se sont tenues les religieuses gardes-malades). Le prix étant de treize mille francs avec des aménagements et avec le mobilier, la dépense s’éleva à 18 127,97 anciens francs.
En 1892, le conseil des directeurs devant un fonds de dotation en progression constante, se porta acquéreur d’une partie de l’ancienne école de filles située rue des Hardilliers face à la Caisse d’ Epargne, tandis d’un autre lot était vendu aux époux Martin-Masse le 9 février de la même année, et ce devant maitre Héry, notaire à Bressuire.
Le 8 juillet 1900, le lot primitivement acquis par les époux Martin-Massé ayant été remis en vente, la caisse d’Epargne se le fit adjuger, par devant Daniel Barrion, notaire à Bressuire, moyennant le prix de 7400 anciens francs net, dans l’intention d’y faire des logements à bon marché. Elle devenait ainsi propriétaire de la totalité de l’ancienne école de filles. En 1905, le Conseil de la Caisse d’ Epargne fut d’avis qu’il pourrait participer à l’embellissement de la ville en construisant un hôtel plus en vue en même temps que plus approprié à son but. Une commission fut chargée de rechercher un emplacement convenable. Elle s’enquit auprès des propriétaires de six immeubles différents. Partout il aurait fallu engager une dépense supérieure aux disponibilités de l’établissement. Malgré une proposition de sursis, la majorité du Conseil décida d’édifier la nouvelle caisse sur son propre fonds. Ce qui fut fait.
On choisit comme architecte M. Burcier en résidence à Bressuire. Le 29 mai 1905, il soumit un projet qui fut adopté. L’adjudication des travaux fut faite le 27 septembre 1905 en 8 lots afin de favoriser toutes les branches de l’industrie et du bâtiment. Après quelques flottements, la Caisse fut finalement édifiée telle qu’on la voit aujourd’hui.
Le nouvel hôtel était prêt à être habité en septembre 1908. Le caissier M. Barreau avait 81 ans. Il fut entendu qu’il ne serait pas astreint à résidence et le conseil prit la détermination de louer le nouveau logement à son successeur, éventuel. Dès cette époque M. Delevault fut désigné par 9 voix sur 16. Il fut nommé définitivement le 3 décembre 1910 pour prendre ses fonctions le 1er janvier 1911. Il fut décidé également que M. Barreau en récompense de ses bons services, aurait la jouissance viagère de son logement. Après son décès, en 1915, son logement fut occupé par l’école primaire supérieure de filles et ensuite par l’hôpital des femmes de France. Dans les jardins, on avait construit des baraquements. Cette partie de l’immeuble fut adjugée le 18 janvier 1920 à M. Pouzineau, curé de Bressuire et abrite aujourd’hui le logement d’une religieuse garde-malade et des garages. L’installation de l’électricité fut faite au cours des années 1926-1927.
Sources : Archives de la Caisse d’Epargne de Bressuire et archives notariales (Me Nivault et Savard)
Article de Jean Camus paru dans la revue Les Amis du vieux Bressuire, Bulletin n°24, 1973, p. -19-23.