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L’Argent, rivière d’Argenton-Château et son affluent « le Dolo », rivière de Bressuire

(Article paru dans Les Amis du Vieux Bressuire, n° 8, article de C. L. CHASTANG p.23 et svt.)

D’une importante étude présentée au Congrès de Parthenay (22 septembre 1957) par M le commandant Chastang, et publié en même temps que les autres communications par la Société des Amis des Antiquités et la municipalité de Parthenay, nous extrayons ce qui suit, pour le plus grand intérêt des lecteurs bressuirais.

« Pourquoi et comment une même rivière, a –t-elle pu recevoir deux noms différents, l’Argent et l’Argenton ? »

Pourquoi et comment un affluent de cette rivière, Le Dolo, dont le nom est attesté depuis 10 siècles, a t-il disparu de nos cartes, à la fin du XVIIe siècle pour y être remplacé par un appellatif improvisé : le Ton ? »

A ce compte, Cassini ne semble pas avoir considéré que l’appellation « Argenton » en tant que nom de rivière, pouvait résulter de la réunion des noms des deux rivières, l’Argent et le Ton, inadmissible découpage, qui semble bien avoir été perpétré après lui dont présentement nous allons faire le procès.

Comment le Ton a-t-il pu prendre abusivement la place du Dolo ?

Si Cassini n’est pas responsable du découpage « argent-ton » cet acte regrettable est sans doute imputable à l’un de ses successeurs de la fin du XVIIIé siècle. En effet, Dupin, dans sa statistique publiée en 1902 écrivait : « L’Argenton tire sa source de deux fontaines, l’Argen (sic) et le Ton ». Il apparait donc que, de son temps, un géographe avait déjà proposé et fait admettre ce fâcheux découpage. Chargé de relever le cours entier du pseudo-Argenton, il constata que le cours supérieur de cette rivière ne portait aucun nom sur la carte de Cassini, et l’appela l’Argent. Visiblement son intention ne fut pas de restituer à ce cours d’eau son nom véritable, mais de sacrifier à une manie déplorable qui a exercé ses ravages dans d’autres noms de rivières (Gyr+onde = Cyrendon Hautes-Alpes). C’est ainsi qu’il baptisa Ton la rivière de Bressuire, ne sachant pas ou feignant d’ignorer que cette rivière portait et depuis de nombreux siècles un nom vénérable, le Dolo, que rien n’autorisait à répudier.

Sans doute a-t-il voulu reconstituer par le procédé simpliste du découpage, Argent + Ton, l’appellatif Argenton consacré par Cassini. Ce serait pour lui une excuse acceptable, mais qui n’efface pas la faute qu’il a commise, en substituant au nom du Dolo un autre nom qui ne signifie rien. Sa bévue a eu pour effet de fausser la carte d’Etat-major et de provoquer des incidents que nous déplorons. C’est pourquoi de toutes nos forces nous la condamnons.

Le Dolo, seul et incontestable nom de la rivière de Bressuire

Le nom de Dolo est attesté en 1065 (Arch. Hist. Du Poitou II-61). En 1370, il a nom Doulo, rivière de Bressuire (Ledain, Dict topogr.). Dans la commune de Terves, une borderie Le Dolo, est citée en 1420. De son coté et toujours dans son Mémoire statistique, le Préfet Dupin, passant en revue les aspects topographiques des communes du canton de Bressuire, parle abondamment de cette rivière.

Le Dolo, origine et signification

Au sud des communes de Terves et de Clazay, au centre de celle de Breuil-Chaussée, où le cours principal du Dolo et certains de ses affluents prennent leurs sources, les altitudes varient entre 231 et 237 mètres. C’est dire que par rapport avec celles du Fouilloux (272 m) et de l’Absie (250 m) le Dolo descend des hauteurs les plus marquantes du département.
Venant de l’ouest, du coté des collines de Millefouillet, le Dolo bifurque bientôt vers le nord, pour aller contourner la colline abrupte que couronne le château de Bressuire. Continuant sa route vers le nord, il fait sa jonction avec l’Argent dans la commune de Saint-Clémentin. Partout des sources abondantes sorties des collines granitiques, alimentent le Dolo.

Partant de ces données sur la nature, l’aspect et la topographie des lieux, tenant compte également des vestiges préhistoriques relevés dans la région bressuiraise, et après nous être assurés que le nom de Dolo n’est explicable ni par le latin, ni par le gaulois, nous pensons être dans la bonne voie, en considérant ce nom de rivière comme étant composé de deux éléments pré-indo-européens : le premier appartenant à la base oronymique , tol/tul, la hauteur, la seconde étant l’hydronyme Wonda (eau), déjà étudié à propos de l’Arjon, l’eau courante venue des hauteurs rocheuses ». Telle est selon nous, la signification la plus conforme à la réalité du nom de cette rivière.

Conclusions et vœux

Aurons-nous réussi, dans cette étude à rallier l’opinion sur la légitimité exclusive que doit revendiquer une de nos rivières, l’Argent et sur la réhabilitation nécessaire du nom de l’un de ses affluents : le Dolo ?
(…)

Sans doute, ne doit-on pas ignorer qu’il est difficile de revenir en arrière, surtout lorsque les erreurs à rectifier se perpétuent depuis deux siècles, avec le bénéfice de la prescription.

Mais nous savons qu’à l’Institut Géographie National, un service ayant à sa tête un ingénieur en chef, toponymiste éminent et compréhensif, assume la charge délicate d’étudier et de faire rectifier les erreurs reconnues flagrantes dans la nomenclature de nos cartes d’Etat-major…

Si MM. les présidents des Sociétés savantes du département des Deux-Sèvres, réunis ce jour de Congrès, et ceux qui ont bien voulu se joindre à eux, approuvent nos conclusions et nos vœux, nous leur proposons de les soumettre à Monsieur le Préfet des Deux sèvres, en lui demandant de les approuver et de prendre toutes les dispositions utiles pour les faire aboutir.